CR de Christophe du Trail Blanc du Sancy (30km-1400m+)

Publié le par Manu

Ma première fois...

 

C'est ce qui s'appelle un compte-rendu « à froid »... de mon 1er Trail Hivernal, puisque 6 jours se sont déjà écoulés depuis ce périple aux alentours du Puy de Sancy, au Mont Dore (63).

 

Par où commencer ??? Je suis tenté par la « préparation » parce que l'on n'improvise pas en « course à pied » et encore moins sur un trail, qui, de surcroit, doit se dérouler entre 900 et 1500 m d'altitude (1400 m dénivelé+).  Et ceci dans la poudreuse que Météo France nous annonce sous forme de « chutes de neige abondantes » !!! D'un coup, je fais moins le malin. Une solution pour le novice que je suis (au-delà de l'entrainement of « course ») : prévoir le matos adéquat (je vous fais grâce du basique).

-        des guêtres de course à pied (pour empêcher la neige de rentrer dans les chaussures)

-        un sifflet, une couverture de survie et coupe-vent (matériel obligatoire imposé par les organisateurs)

-        les bâtons télescopiques (un doute sur leur utilité mais je suis le conseil de Damien)

-        des « yak tracks » (j'espère que les chaussures de trail suffiront car cela me semble lourd... et à chaque foulée sur les 30 kms... : donc « non »)

-        le camel c'est bon mais faut-il acheter une poche isotherme ? On me conseille le papier alu autour du tuyau pour éviter que cela gèle : c'est astucieux et effectivement plus économique)

-        alimentation et hydratation (malto, gatosport, gels, barres énergétiques... « faut pas qu'j'me fasse choper par les douanes ! »)

-        les épingles, les pansements pour les tétons, la licence : ça c'est fait.

 

Pendant les 3 jours précédant la course, je bois 1,5 litre de malto et le samedi, je prépare mon « gatosport » qui se transforme en « Yopsport » puisque j'ai surdosé  en eau : je surveillais les enfants du coin de l'œil (c'est bien connu les hommes ne savent pas faire 2 choses en même temps). Le jour J, dimanche 24/01/2010, je me lève à 7h et je fais chauffer mon « Yopsport » pour en faire une crème dessert au chocolat : ça le fait (pourvu que je le digère correctement). Un coup d'œil par la fenêtre : « cool, c'est juste un peu couvert sur les hauteurs ». Le temps semble relativement correct et je me décide pour 2 épaisseurs plutôt que 3 prévues initialement. Je règle les bâtons, ajuste mon camel : « aaaah ! Ça ballote ! Et ce tuyau qui veut pas s'mettre là où j'ai décidé qu'il serait... Et maintenant, les guêtres qui jouent les récalcitrantes ! Je vais bien...tout va bien... C'est pas l'moment de stresser (trop tard). And the cherry on the cake : le GPS qui ne fonctionne pas. Tant pis, je pars sans. »

=> le novice dans toute sa splendeur, qui n'a pas testé son matériel en situation réelle...

On se détend... On respire par le nez...Dans ces cas là, se raccrocher à la technique et la seule pensée que j'ai à cet instant en regardant mes bâtons, c'est le fameux « planter du bâton Mr Duss ». Je souris et m'en vais rejoindre Christine, Véro, Damien, François, Manu, Michel et Pierre-Alain idéalement placés sur la ligne de départ. Ils sont affutés comme jamais; dans les starting-blocks, prêts à en découdre avec l'enfer blanc qui nous attend.

Les dernières consignes sont données. Le coup de pétard retentit et voilà les quelques 800 pèlerins partis en croisade pour, au choix, 20 ou 30 kms de balade. Ça déboule de tous les côtés. « Tout doux bijou » : ne pas suivre le rythme imposé par les cadors et s'échauffer sur les 1ers kms avant d'attaquer la 1ère côte longue de 3kms, avec un dénivelé positif de 400m qui devrait déjà me donner une idée de la difficulté du parcours. Les spectateurs nous encouragent. Qui est-ce qui « bip » ? Ah ! C'est moi ! Ma montre fait des siennes. Tiens, elle s'éteint !!! Plus de pile ? Je pense à François qui, au Trail d'Ecuillé, a connu quelques déboires avec son matériel et je me dis « Zen, soyons zen » : c'est une course « nature » et je ne pense pas faire tomber le chrono de la course, donc « cours Forrest » et pense à boire par petites gorgées... Je suis embêté avec mes bâtons et j'ai peur de blesser un coureur (j'espère que j'ai bien fait de les prendre).

Forrest
Déjà la 1ère côte qui ralentit sévèrement l'allure. Certains marchent déjà après 300m de grimpette. Yes ! Voilà la neige ! Je teste mes bâtons : bien pratique ma fois (j'ai bien fait de les prendre). Je sens que je peine moins dans la montée. J'ai perdu de vue mes intrépides compagnons : désormais, nous nous reverrons à l'arrivée. Le chemin se resserre et nous nous suivons de près telle une cordée de
montagnards. La température baisse au fur et à mesure que nous montons et je me félicite d'avoir investi dans un bonnet et des gants : c'est la positive attitude et pendant ce temps là, je grimpe sans m'en rendre vraiment compte. Ma montre se remet en route d'un coup d'un seul sans raison ! Bizarre. Je ne cherche pas à comprendre car je sens que l'altitude me « dépasse »...

La machine est maintenant chaude et l'utilisation des bâtons m'a réchauffé le haut du corps (ils sont bien ces bâtons : j'ai bien fait...). « Tiens, une route ??? ». Nous courons de nouveau sur le bitume quelques hectomètres avant de longer le Lac de Guéry. J'avoue que je suis un peu perdu car je ne me souviens plus vraiment du parcours et du dénivelé. Pourtant j'ai les 2 tracés dans la poche au cas où... Le fameux « plan B » qui est le 20 kms que je ne veux pas prendre. Allez on trace ! Le chemin est plus large et damé le long du lac et j'en profite pour apprécier le paysage car ce trail demande beaucoup de concentration et de maîtrise dans la course. Le paysage est magnifique malgré un ciel voilé. Le lac est glacé et  enneigé mais certainement pas suffisamment pour le traverser. « Ouais, le 1er ravito ! »

Aucune hésitation, je file avec mes bâtons vers le 30 et je pense à Michel : « rdv à 13h pour l'apéro  »! « OK ! » Mais je ne lui ai pas dit quel jour. Sacré breton shooté à la levure de bière, c'est qu'il me mettrait la « pression » (au passage je vous invite à découvrir le site suivant : http://www.lachope.com/biere-et-sante.php. Je suis sûr qu'il plaira aux professeurs Ars & Jézo, bièrologues internationalement connus).

Mais revenons à nos mouflons ! Je décide de zapper le ravito, bois un peu de potion magique et sors une barre énergétique. C'est tout une organisation de manger en courant avec des bâtons ! Je grignote cette source de glucides, magnésium... qui doit m'apporter l'énergie dont je vais avoir bien besoin car les choses sérieuses commencent : il reste 21kms et 1000m de dénivelé+. Ça y est, ça grimpe de nouveau et le temps jusqu'ici clément, se couvre. Allez ! Je tire sur les bras et m'appuie fortement sur mes bâtons ce qui me permet de reprendre petit à petit quelques coureurs. La piste qui, jusqu'au ravito, semblait parfois encombrée, se vide et la file indienne des trailers s'étire de plus en plus. Les groupes se forment, se déforment...dans le brouillard et la neige qui commence à tomber. Un coureur dit à l'autre : « on est au Puy du Loup. On a 2-3 kms de quasi-plat jusqu'à la Banne d'Ordanche et après ça descend pendant un peu plus de 3 kms ».

« Vivement dans 3 kms ». Je m'accroche à ces 2 bons hommes qui m'ont l'air de connaître leur affaire. On ne voit pas le paysage, juste des traces dans la neige, des ombres d'hommes difformes et mes sens sont un peu chamboulés. L'ouïe prend la relève sur la vue et je prends plaisir à écouter ses bruits de neige et de glace craquantes. Chaque appui est important et doit être efficace, aidé par le relais pris par mes bras « embatonnés ».

« Ahhh ! Fini la grimpette. Enfin le fameux plateau avant la Banne de Bidule (enfin je crois. Je ne me rappelle plus à vrai dire et je suis trop essoufflé pour demander...) ». J'ai chaud et j'enlève mon bonnet. Je cours de nouveau après avoir marché pendant 1km d'ascension...mais j'suis plus sûr de rien ?!

« Tabernacle ! Y sont où les coureurs ? C'est par où ?... »

Je baisse les yeux pour retrouver et suivre la trace car j'ai perdu de vue ceux qui me devancent. « Ah, voilà le sillage ! »

Je suis attentivement les empreintes et déjà quelques coureurs sans bâtons que j'ai doublés dans la montée me talonnent. 2 me doublent avec une foulée légère et rasante qui leurs permet de rester à fleur de neige glacée et de ne pas s'enfoncer. Et un 3ème... plus lourd ou moins technique, qui se gamèle et se transforme en yéti en 2 secondes : « bon, bah, j'vais rester derrière  !»

« Désolé. Vas-y ».

Ça descend ! Je croise les doigts pour que les bâtons ne me gênent pas. Parfait, c'est un peu comme descendre à skis. Je me relâche et lâche les gaz dans la pente bien raide. Je « redouble » d'efforts et également ceux qui m'avaient repris sur le plateau.

Arrive le 2ème ravitaillement : je mange un morceau, bois un peu, échange 2-3 mots avec les bénévoles et repars : ils sont vraiment sympas tout ces gens de l'organisation. Ça fait du bien tout ces encouragements. « Allez plus que 13kms (enfin j'espère) ! »

« M....Flûte ! Ça remonte ». En avant les bâtons ! Je grappille des places dans l'ascension et ça fait du bien au moral. Je suis bien et heureux d'être là. J'ai bien fait d'accepter l'invitation de Christine qui, certes, m'a semblé saugrenue voire disproportionnée vue mon niveau mais elle avait raison. C'est une super expérience à vivre. « Tiens d'ailleurs ! Ils sont où mes camarades de luge ?

Certainement loin devant. Ils auraient pu m'attendre quand même !!! Des fois que je me perde...que le Yéti... »

J'ai la banane et je marche de nouveau... J'ai l'impression d'avoir plus marché que couru. Bien sûr, c'est une marche active voire nordique qui me permet d'avancer, de progresser.

Au 20ème km, coup de théâtre : mes 2 mollets se contractent  douloureusement. « Bingo, une crampe à chaque mollet ! » Je ralentis encore. Je suis mal : 10 bornes ! Il reste 10 bornes... Je n'ai jamais eu de crampe lors de courses. Je bois un peu plus et me souviens que j'ai un gel appelé « myo cramp ». Ça ne s'invente pas (c'est déjà fait). J'aurai dû le prendre avant mais ça ne peut pas être pire... « Sauvé ! » J'ingurgite le gel et continue en m'appuyant de plus en plus sur mes bras grâce à mes super bâtons !!! « Ça va aller ! Ça va revenir...Allez ! On lâche rien... »

Tout est bon : l'auto-motivation; l'envie de finir ce 1er Trail dans la neige... Tout doit contribuer à ce que ça aille mieux et je me dis que ma potion magique va forcément faire effet d'ici 10 à 15 minutes.

Et ça monte ! Et ça monte ! Que c'est long...et malgré tout je reprend quand même quelques coureurs. Formidables ces bâtons : c'est décidé, je les encadre quand je rentre.

 « Tiens un igloo ! Tiens un inuit ! Oh ! Un Husky ! » Je crois que je suis touché : c'est l'ivresse des hauteurs ! Ça y est j'ai perdu le nord... Et l'inuit de dire : « vous êtes au plus haut et après ça descend pendant 5kms. »

Retour à la réalité. Effectivement, ça descend et même plus vite que je voudrais : je chute sur les fesses et glisse ainsi sur au moins 10 mètres. Il me faut rétablir le contrôle. Je me redresse et descends prudemment de peur que mes mollets ne se rappellent à mon bon souvenir. Étrangement, ça tient ! Profitons de la descente et prenons de nouveau du plaisir avec le fameux « tout chuss... » Yiiihaaahh ! Cool, ça va de mieux en mieux. Je récupère un coureur, puis un 2ème, un 3ème... « Allez ! On y est presque ». Je m'enflamme un peu puis je suis calmé dans mon élan par un autochtone qui déboule à toute allure me donnant l'impression de faire du surplace voire un « snowwalk » (de la même famille que le « moonwalk »).

De beaucoup de neige, nous passons à de moins en moins... puis à la boue... « Oh non ! Pas la gadoue !... »

Malgré tout, je joue du bâton et descend plutôt bien que mal : je suis peut-être fait pour monter et descendre plutôt que le plat ??? En vue, le 3ème ravito où l'on m'oblige à m'arrêter pour lire mon code-barres. Vous ne devinerez jamais : j'ai mal partout et je marche tant bien que mal vers la table pour boire et manger un peu avant de repartir; enfin j'espère !

La machine est grippée. Je marche encore ! Un peu plus vite et une descente me relance. Ça revient. Pourvu que ça tienne ! « Allez ! Plus que 4 kms ! »

Un gaillard me rattrape et m'encourage au passage. Sympa ! Il s'éloigne et finalement, je le reprends dans une côte grâce à mes fidèles bâtons et non pas grâce à mes jambes en bois. Il s'accroche et nous échangeons quelques ressentis avant de me balancer cette sentence qui résonne encore : « profite de cette côte, c'est la dernière et elle fait du 15% pendant 2kms! »

A ce moment là, je ne sais plus où j'habite; je me demande si j'aurai suffisamment de jus pour finir; s'il blague... Je me mure derrière un silence total car chaque force et souffle comptent, et je suis bien déterminé à finir. Alors, je grimpe...difficilement mais je grimpe.

Nous sortons de la forêt pour courir de nouveau sur le goudron. Jusque là, j'avais évité d'utiliser les bâtons sur l'asphalte mais j'ai besoin de chaque muscle. Je dois être drôle à voir ainsi à déambuler de la sorte avec en prime le cliquetis des bâtons sur le macadam comme si je courais en escarpins !!!

Retour au chemin enneigé bizarrement tracé sur lequel on évite les genets. Je m'arrête pour laisser passer un coureur car je ne peux aller plus vite. C'est la fin du dénivelé positif et place, maintenant, à la dernière descente vers le bonheur. Jusqu'à présent, j'ai plutôt bien négocié les descentes donc...

Je dévale les pentes comme un gamin avec l'énergie qu'il me reste. J'entends le micro du commentateur. Tu y es presque. J'allonge la foulée. « J'arrive... »

Nous sortons des sous-bois, des chemins et des pâturages pour arriver dans la ville du Mont Dore. Nous courons sur la route et plus de dénivelé : je me traîne ! 2 coureurs puis un 3ème me dépassent. Impossible de les suivre. Ma foulée doit plus ressembler à une marche qu'à une course... Je sens l'écurie et plus personne ne me passera ! Je tourne au portail du gymnase pour entrer dans la cours. Encore 30 mètres !!! Je tourne à droite pour enfin passer sous la banderole tant attendue, celle de l'Arrivée ! Super, ma Chérie Soizic (et non pas Soizig), Sophie (Madame Jézo) et tous les enfants sont là. C'est génial. L'émotion monte. Le bonheur, l'extase, la joie, le plaisir... Tout se bouscule et je ne trouve rien de mieux que de leurs tirer la langue. Bel exemple... Ça y est, je franchis la ligne d'arrivée. Une demoiselle m'enregistre et me donne mon temps ainsi que mon classement : « 4h04 et 179ème place ». Je suis très étonné car je n'ai pas l'impression d'avoir couru pendant 4 heures : cette course est passée comme un charme (bien sûr !!! Surtout maintenant que c'est fini...).

Je cherche mes amis, certainement déjà douchés et prêts pour l'apéro.

« Ah ! François ! Ça va ? »...

Les retrouvailles se font autour du ravito d'arrivée et déjà « on refait la course » ! Une bière pour se remettre des émotions et direction la douche avant de revenir manger avec tous les coureurs un plateau « spécial » de spécialités locales... Le rire est omniprésent et la bonne humeur de l'équipe présage une soirée plus que sympathique.

Un peu plus tard un épisode pour les moins de 18 ans : merci d'éloigner les enfants. En fait, je ne commenterai que brièvement le moment intime que Manu & Michel ont passé dans le jaccuzi... Le mieux est de leurs demander.

La soirée fut à la hauteur de l'évènement................................................

 

Avec le recul :

-        je suis très heureux d'avoir participé à ce trail et pressé d'en faire un autre (179ème sur 382 arrivants : qui l'eut cru ?)

-        j'ai bien fait de ne pas prendre l'appareil photo

-        j'ai bien fait de prendre, devinez quoi, mes « bâtons »

-        pour le prochain, je m'organiserai mieux au niveau matos

-        je prendrai le temps d'aller voir les masseurs et kinés à l'arrivée car je n'ai récupéré l'usage de mes jambes que 5 jours plus tard

-        je suis bien content que Météo France se soit planté... du bâton !

 


Pour conclure, j'ai mis autant de temps à écrire ce compte-rendu qu'à courir le trail !!!

 

Remerciements : au patron du « Tsar » et ses serveuses qui nous ont gratifié de musiques douces et d'un service  exceptionnel....lement nuls (une image de la restauration française qu'on ne veut plus voir). A la pâtissière qui a réalisé le « Bougnat ». A la résidence qui a eu la chance de nous accueillir... Aux pompiers qui ne se sont pas déplacés suite à une alarme incendie déclenchée par ??? Inadvertance. Aux luges. A Météo France qui a brillé par l'inexactitude de ses prévisions et c'est tant mieux. Et une dédicace spéciale à mes « bâtons » !

 3 Bar ConcertDSCI0129 DSCI0154-a donne envieChristopheBougnat ou Doubichou

Christophe.

Publié dans Courses

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P
<br /> ça c'est du commentaire...détaillé ! Effectivement, faut bien quatre heures pour la rédac! Merci et encore bravo, ça fait peur...et envie, et ça fait envie parce que ça fait peur, aussi !!!<br /> <br /> <br />
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